Le polo, un sport du Moyen Âge.
Titre / dénomination : Gobelet aux cavaliers
Lieu de production : Syrie
Date / période : Milieu du XIIIe siècle
Matériaux et techniques : Verre soufflé, décor émaillé et doré
Dimensions : H. 15, 5 cm ; D. 10,5 cm
Ville de conservation : Paris
Lieu de conservation : Paris, Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam
Numéro d'inventaire : OA 6131
Inscription :
Sur le bandeau supérieur on reconnaît : «Gloire à notre maître le sultan, le roi savant, élevé, le champion de la foi (al-mujâhid), le combattant des frontières (al-murabit), sultan de l’islam et des musulmans, le sultan, le roi ».
Le bandeau inférieur reprend en abrégé la même formule votive.
Le gobelet, en verre blanc, présente des bords droits à la base, puis s’évase brusquement au tiers supérieur. Cette forme caractérise un groupe de verres dont on situe la production vers le milieu du XIIIe siècle.
Dans une large frise médiane, trois cavaliers galopent à travers de gros rinceaux d’or. Ce sont des joueurs de polo coiffés de turbans bleu, rouge et blanc et vêtus de caftans portant des bandeaux d’écriture en haut des manches. Leurs montures sont émaillées de blanc, de brun-rouge et de noir. De part et d’autre de cette scène courent deux inscriptions dorées sur un fond rouge posé sur la paroi interne du verre. Selon les usages de cette époque, elles ne livrent pas le nom du commanditaire. Tracées en cursif, elles sont d’une lecture difficile.
L’iconographie choisie pour ce gobelet relève de la furusiyya, de l’art équestre et des disciplines qui y sont attachées. Il s’agit ici du jeu de polo qui fut pratiqué dans le monde islamique dès le IXe siècle. Ce sport noble, inspiré par la guerre, ses attaques et ses esquives, est peut-être une invention persane de l’époque achéménide. Les Mamlouks le pratiquaient beaucoup. Quant au nom moderne de polo, popularisé par les Anglais, il viendrait du tibétain pil-lu qui est le bois avec lequel on fabrique le maillet. On trouve souvent des représentations de ce jeu sur les objets princiers, notamment dans les médaillons ornementaux des bassins en cuivre produits en Syrie et en Égypte au cours du XIIIe siècle.
On sait la fascination qu'exerçait cette verrerie polychrome et dorée sur les chrétiens d’Occident qui
ne la connaissaient que par de rares exemplaires byzantins. Elle entrait dans la catégorie des « merveilles » et les Croisés de Palestine l'ont sans doute recherchée. Le monde latin, jusqu'à la fin du XIIIe siècle, ne pouvait rien offrir de comparable même si, en joaillerie, les techniques d'émaillage sur feuilles d'or cloisonnées (les émaux de plique) atteignaient, à Paris, une extraordinaire qualité. Le verre émaillé et doré produit par les ateliers syriens dans la seconde moitié du XIIe siècle - sous le règne des Ayyubides - donnera au Proche-Orient musulman une suprématie économique jusqu'à ce que Venise, puis Murano, réussissent à le reproduire vers 1290. Ce faisant, les ateliers vénitiens reprendront le style « syrien ». Des gobelets vénitiens ornés d'écus européens, mais ceinturés d'écriture pseudo arabe, comme le fameux exemplaire du British Museum qui porte l'inscription latine Magister Aldrevandin Me Fecit (« maître Aldrevandin m'a fait »), montrent clairement cette filiation (1). En retour, il est possible que la Syrie ayyubide, puis mamlouke, ait produit de la verrerie pour les Margherita à Orvieto, en Ombrie (Italie). Il était éventuellement associé à la liturgie chrétienne ou déposé dans le trésor de l’église.
NOTE :
(1) Londres, British Museum, MLA 1876.11-4.3.
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