MARCO POLO, UN CONTEUR DE VOYAGES
"Il n'y a nulle de ces îles où il n'y ait […] beaucoup de sortes d'épices." "Il y croît maintes épices qui jamais ne furent vues dans notre pays" ; " [Dans] le royaume de Coilun […] il y a également du gingembre. […] Il y pousse également du poivre en grande quantité. Et voici comment. Ce sont des arbres domestiques. Ils les plantent, et en récoltent le poivre aux mois de mai, juin et juillet. […] Les marchands du Mangi, du Levant et d'Arabie y viennent très nombreux, et y font grand commerce."
"On arrive alors à la mer Océane. Sur ces rives, il y la cité de Curmos, avec son port. Les bateaux y abordent chargés d'épices, de pierres précieuses, de perles, d'étoffes d'or et de soie, de dents d'éléphant et de bien d'autres marchandises. Les marchands les vendent à d'autres marchands qui eux-mêmes vont en faire commerce à travers le vaste monde. […] On y fait un très bon vin de dattes bien épicé. Il donne la diarrhée à ceux qui n'en ont pas l'habitude et peut les purger entièrement. Mais ensuite, il leur fait grand bien et les fait engraisser."
C'est de cette manière, en des termes prompts à stimuler la curiosité et l'envie de ses lecteurs que Marco Polo parle, en 1298, des épices d'Orient dans Le Devisement du monde (l'ouvrage sera par la suite davantage connu sous le titre de Livre des Merveilles). À plusieurs reprises, le récit évoque les épices que son auteur a découvertes lors de son voyage et de son séjour en Chine, et il fait état de leurs différents usages et de leur commerce. Les descriptions comportent certes une part de vérité, mais aussi beaucoup d'erreurs : Marco Polo contribue à véhiculer tous les mythes et légendes relatifs aux épices, aux lieux et aux modalités de leur production et de leur récolte. À aucun moment, il ne dévoile la localisation précise des régions où telle épice est cultivée ou récoltée…
C'est entre les murs d'une prison de Gênes que Marco Polo, qui ne sait pas écrire, a dicté à Rusticello de Pise, son compagnon de cellule, le récit du très long périple – vingt-quatre années ! – qui l'a conduit jusqu'en Chine. Six ans après son retour dans sa ville natale de Venise, le grand voyageur s'est trouvé enrôlé dans une nouvelle guerre contre la République de Gênes, guerre qui verra la défaite, en 1298, de la cité des Doges. Rusticello retranscrit en français (la langue des élites intellectuelles de l'Italie du Nord), les aventures et découvertes que lui relate Marco Polo. L'ouvrage sera traduit en latin puis dans les principales langues européennes. Il deviendra très vite un véritable best-seller : cent quarante-trois manuscrits (parfois superbement enluminés) sont parvenu jusqu'à nous, et l'imprimerie ne fera que renforcer son succès. On sait que Christophe Colomb lisait et relisait avec avidité l'ouvrage de Polo et y trouvait une motivation renouvelée pour, à son tour, partir à la découverte des terres aux épices.
Membre d'une grande famille de commerçants, Marco a dicté un ouvrage pratique, destiné à d'autres marchands, une sorte de "guide de voyage pour hommes d'affaires". Il fournit des conseils relatifs aux itinéraires à suivre : pour se rendre de Venise à Pékin, le jeune Vénitien a emprunté les routes terrestres qui traversent l'Asie centrale et sont utilisés depuis des siècles pour le transport des épices et autres denrées précieuses. Il a ensuite parcouru la Chine en tous sens, avant d'effectuer la plus grande partie du trajet de retour par voie maritime (traversée de la mer de Chine et de l'océan Indien, puis remontée du golfe Persique). Le Livre des Merveilles mentionne les villes traversées, indique les distances séparant deux localités, précise les denrées qu'on peut y acheter, les systèmes de poids et mesures ou les modalités de paiement en vigueur.
Pour vous faire découvrir l'ouvrage de Marco Polo, voici une sélection
de 30 enluminures extraites du Livre des Merveilles accompagnées
d'un commentaire audio réalisé par la Bibliothèque Nationale de France.
À lire également la présentation du tome 1 de la bande dessinée MARCO POLO, le garçon qui vit ses rêves.
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